158 pages.  30 dessins

Éditions Arthaud. 21€

Dépôt légal octobre 2023.

ISBN : 9782080284310

Préambule (extrait)

"Les lignes qui suivent tentent simplement de raconter les plantes, sans prendre la parole à leur place. Raconter pour rencontrer. Ou du moins d'essayer : leur manière d'être au monde si étrangère à la nôtre pourrait être littéralement qualifiée "d'extraterrestre". Le subterfuge est alors tout trouvé pour parler d'elles : s'aventurer du côté de l'extraordinaire, aux limites terrestres du vivant : en haute altitude, dans la plus "extraterrestre" de nos marges géographiques; Là où l'humain ne s'est jamais installé mais où nombre de plantes habitent."

 

 

Texte (extrait)

Pages 49.

L'androsace de Saussure.

Androsace saussurei

 

LES LAURIERS DE L'ANDROSACE

 

"Rocher de l'Heureux Retour, 3504 mètres d'altitude, face nord du Mont blanc. C'est sur cette petite arête rocheuse, perdue dans l'immensité des glaciers des Bossons, que Saussure, savant genevois, pionnier de l'alpinisme, fit la première observation répertoriée d'une plante en haute altitude : le silène acaule.

 

Presque deux siècles et demi plus tard, retourner en plein été sur le rocher de l'Heureux Retour, s'est mué en  en excursion à haut risque : dés le retour du printemps, le glacier des Bossons gronde et ouvre grand ses multiples crevasses, les ponts de neige sombrent dans l'anorexie et les séracs, tels des orchestres du chaos, reprennent la mélodie grinçantes des effondrements. La montagne passe à l'instable. Seul le retour des floraisons printanières offre une promesse. Car retourner sur les lieux, deux cent trente trois ans après Saussure, c'est ouvrir une fenêtre sur  la dynamique de ces végétations extrêmes, sur les conséquences du changement climatique sur les plantes des glaciers.

 

En 2020, les conditions semblent enfin offrir un compromis : l'enneigement du printemps finissant est suffisant pour boucher les crevasses et la saison assez avancée pour observer la floraison d'éventuelles plantes. Nous formons une équipe de quatre, soudés par la passion de la montagne et de la botanique des hauteurs : Brad Carlson, Nicolas Bartalucci, Sébastien Lavergne et moi. Il nous faut attendre le 2 juin pour qu'enfin toutes les restrictions nationales due à la pandémie Covid-19 soient levées. A 6 heures du matin nous arrivons aux Houches, près de Chamonix, pour attaquer les 2000 mètres de dénivelé qui nous mèneront au refuge des Grands Mulets (3051 mètres). Pas de remontée mécanique : sourire aux lèvres, nous nous remettons dans les pas de la caravane de Saussure.

Dans le massif du Mont-Blanc, il faut sans cesse jouer avec les conditions météorologiques. Nous avions prévu trois journées mais nous n'en n'aurons que deux avant l'orage cataclysmique annoncé. Alors, dés l'arrivée aux Grands Mulets, nous notons, relevons, échantillonnons, investissons tous les recoins. Nous sommes seuls, heureux, robinsons d'un océan glacé.

...."

 

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