Inventons l’espace, le désir, le vent,

Les cheveux dénoués,

La mer première,

La chair lisse de l’enfant,

Le muscle long du premier émoi.

Un homme primitif se réveille.

Nous sortirons des cavernes.

Osons crier, aimer.

Redonnons des bras à l’audace.

Rendons sa force à l’ongle,

L’attention à l’oreille.

Multiplions les sens.

N’entendons que la cataracte des rivières.

 

Mes manières Instinctives

Jean Malrieu

 

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L’amour tremblant

 

Cet arbre, dans mes bras, c’est toi.

Je suis pris à l’impossible. La fée sous l’écorce,

c’est toi dans le sommeil. Ô corps lisse, comment

t’infuser chaleur ? Arbre ou femme pris à califourchon,

je chevauche le vent, les saisons. Je monte au faîte et là,

balancé par la vie et la ramure, par ton langage de voilier,

j’écoute les forces obscures de la terre passer dans nos veines

jumelées. Parle-moi du désir d’être l’autre, de vieillir sous

la même brise. Nos racines, nos mains se confondent, vivantes

sous le drap de noces.

Ô cheminement de l’amour consentant sous les baisers du soir.

 

L’amour vit de ce qu’il brûle.

 

Le plus pauvre héritier

Jean Malrieu

 

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Déjà le printemps !

Les eaux caressent les prairies.

Tout est source et la sève coule. La fleur d’aubépine,

la fleur de mars, et son odeur amère sont assises à l’ombre

des peupliers sans feuilles. La forêt nue ressemble au vitrail

de la rosace. Le ciel est une carte postale au-dessus du lavoir.

Le moulin a un parfum de fourrure,

le cyprès compte les nuages qui passent le pont.

 

        

 

 Mes manières Instinctives

        Jean Malrieu

 

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